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ENTREPRENEURIAT EN MILIEU ESTUDIANTIN : A la découverte de l’expérience du jeune Kadré Sawadogo, étudiant-entrepreneur résident à Istanbul !

mercredi 11 juillet 2018


Nombreux sont les étudiants qui se jettent très tôt dans l’aventure de la création d’entreprise. Parallèlement à leurs formations académiques, ils arrivent à concilier études et vie d’entrepreneur avec succès. Kadré Sawadogo fait partie de ceux-là. Alors qu’il est étudiant en Génie Civil, option hydrauliques à l’université d’Aksaray en Turquie, il crée en 2016 sa propre entreprise dénommée Mira Incubator, spécialisée dans la conception et la vente des couveuses et bien d’autres articles, services et produits d’élevage moderne. Ce qui lui confère de facto le statut d’étudiant-entrepreneur dont il est si fier. A travers cette interview qu’il nous a accordée le lundi 09 juillet 2018, il nous présente son entreprise tout en nous livrant son expérience d’étudiant-entrepreneur ainsi que les éventuelles difficultés auxquelles l’on pourrait faire face dans ce domaine.

Toute Info : Présentez-vous brièvement à nos lecteurs et parlez-nous de la naissance de votre projet.

Kadré Sawadogo : Je me nomme Kadré Sawadogo, je suis né à Kongoussi où j’ai passé une partie de mes études primaires puis la seconde partie à Ouaga. Après l’obtention de mon Baccalauréat en 2012 je me suis inscrit en Science Economiques et de Gestion à l’Université Polytechnique de Bobo-Dioulasso où après une année d’étude j’ai eu l’opportunité de partir poursuivre mes études en Turquie. Présentement je suis étudiant en Génie Civil option hydrauliques à l’université d’Aksaray en Turquie.

Comment est née l’idée de se lancer de l’entrepreneuriat ? Et comment cette idée s’est-elle concrétisée ?

Tout a commencé en été 2016 quand j’ai décidé de réaliser un petit projet avicole où il me fallait une couveuse. Etant toujours en Turquie j’ai voulu acheter la couveuse en ligne. Quand j’ai lancé la recherche sur web j’ai trouvé que les prix étaient trop cher, environ 300.000 FCFA pour une couveuse de 200 œufs sans compter les frais de transport jusqu’au Burkina. C’est en continuant la navigation que j’ai vu un article intitulé « Kuluçka ev yapım » qui veut dire « Couveuse fait maison ». C’est en lisant l’article que j’ai su qu’avec peu d’argent on pouvait se fabriquer une couveuse avec des pièces disponibles sur le marché. J’ai ainsi acheté les pièces en ligne pour un essai et j’ai conçu ma toute première couveuse à partir d’un ancien réfrigérateur. Lors du premier essai j’ai eu un taux d’éclosion d’environ 70%, ce qui était déjà bon pour une première expérience. Etant convaincu que c’était vraiment une réalité de pouvoir fabriquer sa propre couveuse grâce à des pièces tels que les thermostats, résistances chauffantes, hygromètres ainsi que d’autres, je me suis dit pourquoi ne pas les rendre accessible sur le marché sous régional afin de permettre à nos vaillants éleveurs de pouvoir se procurer des couveuses à des prix très réduits. C’est ainsi qu’est né Mira Incubator.

On sait qu’il n’est pas toujours aisé surtout pour un étudiant de parvenir, comme le disent les Latins, Ad augusta per angusta, à des résultats grandioses par des voies étroites… Alors, dites-nous franchement, avez-vous bénéficié de soutien quelconque pour le démarrage de votre projet ?

Pas du tout, j’ai démarré mon projet avec seulement 100.000 FCFA que j’ai obtenu grâce à la bourse d’étude dont je bénéficiais.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez fait face lors de la concrétisation du projet ? Et comment les avez-vous surmontées ?

Les toutes premières grandes difficultés rencontrées sont entre autres la distance du faites que je réside en Turquie alors que le projet se réalise au Burkina et aussi la limitation des ressources de financement. Pour ce qui concerne le problème de distance j’ai formé une équipe sur place qui exécute les travaux pendant mon absence. Mais au début j’étais obligé de faire plusieurs va-et-vient entre la Turquie et le Burkina. Concernant les ressources de financement j’emprunte quelques sommes des amis et parents mais ça ne résout pas totalement le problème. Je m’efforce et j’assure avec les moyens du bord. Néanmoins nous souhaitons avoir des soutiens surtout financiers pour aller très loin et couvrir toute la sous-région.

Parlant justement de formation, vous avez organisé un séminaire de formation le weekend du 07 au 08 juillet à Ouagadougou. Séminaire auquel plusieurs personnes ont pris part. Dites-nous quel est l’objectif visé à travers une telle formation ? Plus spécifiquement qu’est-ce que les participants ont pu tirer comme profit après la formation ?

La formation organisée par Mira Incubator avait pour thème : la fabrication et l’utilisation des couveuses solaires et électriques. Cette formation vise à donner aux éleveurs les techniques et connaissances nécessaires qui leur permettront de fabriquer eux-mêmes leurs propres couveuses à partir de matériels disponibles sur le marché local. A la fin de la formation les participants en ont beaucoup appris et dès le lendemain certains d’entre eux ont commencé à mettre en pratique leurs acquis en fabriquant leurs propres couveuses.

Pourquoi Mira Incubator ? Qu’est-ce que ça signifie concrètement ?

« Mira Incubator » est un terme anglais qui veut dire « Couveuse Mira » en Français. J’ai surtout choisi le nom en anglais car j’ai voulu donner un caractère international au projet. Mira Incubator est née de l’idée de promouvoir les couveuses artisanales dans la sous-région. Pour cela nous offrons des formations sur la fabrication des couveuses et nous commercialisons aussi les pièces entrant dans la confection de celles-ci. Nous mettons également à la disposition des aviculteurs des couveuses déjà fabriquées, prêtes à l’utilisation.

Dites-nous c’est quoi être étudiant-entrepreneur ? Et comment arriver justement à concilier parfaitement ces deux occupations ?

Etre un étudiant entrepreneur n’est pas facile ; d’une part il y a les travaux académiques et d’autre part il y a les foires et séminaires à participer et aussi la gestion de l’entreprise. Mais en réalité c’est ce qu’il faut car entreprendre pendant les années d’études universitaires nous permet d’avoir permanemment des idées novatrices. C’est une période où nous avons plus d’inspiration. Je fais de mon mieux pour concilier études et business.

Travaillez-vous avec des partenaires ou évoluez-vous en solo ?

Dans le cadre de la réalisation du projet je travaillais seul mais actuellement je collabore étroitement avec des entreprises du domaine en Turquie et dans la sous-région. J’emploie également trois personnes pour la conduite des travaux.
Toute Info : Comment aimeriez-vous voir Mira Incubator dans 10 ou 15 ans ? En d’autres termes, quel est le plus grand rêve que vous nourrissez pour votre projet ?
Kadré Sawadogo : L’objectif premier de Mira Incubator étant de promouvoir les couveuses artisanales, nous aimerions que dans les années à venir chaque aviculteur en zone rurale surtout ait sa propre couveuse. Ceci permettra de booster la production avicole ainsi nous pourrions atteindre une sécurité alimentaire durable. Au-delà de l’élevage j’ai encore d’autres projets, notamment dans le domaine de l’agriculture, basés sur les systèmes d’irrigation.

Nous sommes pratiquement au terme de notre entretien, quels conseils aimeriez-vous donner à vos amis étudiants qui souhaitent se lancer dans le domaine de l’entrepreneuriat ?

Vous savez, on n’étudie pas pour devenir forcément un fonctionnaire de l’Etat d’autant plus qu’il y a du chômage galopant chaque jour. L’entreprenariat devient la solution inéluctable. Je conseille surtout aux jeunes de commencer toujours par de petits projets car les grands projets sans financement mènent au découragement. Je les invite aussi à investir par exemple dans l’agrobusiness car c’est une mine d’or inexploitée en Afrique.
En ce qui me concerne, je ne me suis pas lancé dans l’entreprenariat suite à une quelconque décision. Depuis mes premières années à l’université j’avais l’habitude de tirer du profit des situations qui se présentaient devant moi. Comme exemple quand je suis arrivé à l’Université Polytechnique de Bobo en 2012, j’ai aussitôt constaté que je pouvais tirer profit en faisant des photos d’indenté sur le campus, c’est ainsi que j’ai mis en place à l’époque le fameux SAWKAD PHOTO, où je pouvais même réaliser un chiffre d’affaire journalier de 30.000 FCFA, ce qui n’était pas peu pour un étudiant. Il y a plein d’autres exemples comme celui-ci.

Propos recueillis par Noufou OUEDRAOGO