Chroniques IX (9) Voilà maintenant une semaine que nous sommes dans le mois de ramadan. Déjà pour certains et seulement pour d’autres. Mais au moins une semaine pour tous. Mon propos n’est pas sur le temps qui reste (la durée), qui peut paraitre long ou court selon le « vécu » de chacun. Je voudrais qu’à un quart du chemin parcouru, on tente une mini-évaluation des efforts déjà réalisés et de rectifier au besoin notre trajectoire.

J’ai essayé tout au long de la semaine de remuer les plaies que nous transportons et parfois dans un langage assez cru qui fait mal et fait peur. Mais c’était pour que nous ne versions pas dans l’autosatisfaction, juste parce que le mois de la miséricorde est arrivé. Il faut que nous méritions cette miséricorde. Bien vrai que les textes disent que nul n’aura le paradis que par la grâce d’Allah, mais ces mêmes textes ajoutent que « la miséricorde d’Allah est proches de ceux qui agissent bien ».
C’était aussi pour que nous ne nous contentions pas de l’aspect règles en occultant les finalités qui constituent l’essence même de la pratique ; cet oubli a fait dire à un critique des religions Dominique Sourdel que « l’islam est un religion juridique » : on se focalise sur les aspects halals, haram, interdit, innové et on se préoccupe peu des aspects pratiques et utilitaires !

Après une semaine de jeûne, maintenant qu’on a oublié le croissant et sa mauvaise lubie de nous diviser, que chacun sait à quelle heure il jeûne et à quelle heure il rompt, combien d’unités de prières il fait à tarawih, quel impact avons-ressenti jusque-là ?
Ressentons-nous que le jeûne est un bouclier ? Un bouclier qui nous protège contre nos bas désirs et nos mauvais penchants ? Un bouclier qui nous préserve des bassesses d’ici-bas avant de nous protéger de l’enfer ?
Sentons-nous que les portes de l’enfer sont fermées et que celles du paradis sont ouvertes ? En clair avons-nous aménagé des voies pour mériter le paradis et pour éviter l’enfer ? Car en vérité, il s’agit pour chacun d’ouvrir son paradis, de fermer son enfer et d’enchainer son diable .
Sentons-nous maintenant que la nourriture, l’eau, la santé, la vue, le mari, la femme, les enfants, les parents sont des bienfaits énormes de Dieu ?
Donnons-nous plus de valeur aux bienfaits de Dieu ?
Sommes-nous plus proches de créatures d’Allah ? Est-ce que leurs joies et leurs peines sont miennes ?
Il faudra que nous ayons le courage de nous poser les questions difficiles : qu’est-ce qu’une semaine de jeûne m’a apporté sur le plan comportemental ? Est- ce que je ne pouvais pas faire mieux ?
Qu’est-ce que j’ai appris de nouveau sur ma religion ? Et qu’est-ce que j’ai mis en pratique ?
Qu’est-ce que je dis le soir à Allah au moment de la rupture ? Est-ce que j’ai invoqué pour que cessent l’insécurité et l’incivisme dans mon pays ? Pour que cessent les famines, les guerres et les maladies dans le monde ? Pour que règnent la vérité et la justice ?

Après une semaine de jeûne je devrais avoir établi pour mon usage personnel un viatique, c’est-à-dire une feuille de route, qui m’accompagne et me permette de remplir le mois de choses utiles.
Le jeûne d’une semaine n’est pas assez significatif pour nous changer fondamentalement mais il l’est suffisamment pour nous orienter au plan des résolutions.

A l’échelle communautaire, le jeûne est un puissant moyen de réunion de toutes les composantes de la Oummah. Tout le monde vient à la mosquée, assiste à la prière et écoute les multiples prêches, C’est le moment de penser à un programme de fidélisation qui maintienne les gens au-delà de ramadan mais aussi de prendre attache avec ces nouveaux fidèles, de comprendre leur agenda et de prendre en compte leurs remarques.
La première semaine de ramadan est celle de la mise en train : elle est essentielle pour la réussite des jours à venir. Je prie Allah qu’il nous pardonne nos imperfections et nous permette de bénéficier pleinement du mois de ramadan.

Imam Alidou ILBOUDO
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